L'été 1961, j'ai passé trois mois dans cet établissement mal nommé. J'avais 7 ans.
J'ai certainement refoulé bien des souffrances, mais j'ai un souvenir très précis du réfectoire. Tous les matins une pile impressionnante de tartines attendait à côté de chaque bol. Je vomissais tous les matins, dans les lavabos à l'entrée du réfectoire, puis la monitrice me ramenait à ma place pour finir les tartines. Le reste de pain était émietté dans le bol de chocolat et il fallait tout manger, sous la menace de devoir le faire à l'infirmerie sous la table d'examen. Perspective terrorisante ! Je me souviens que le médecin était une femme.
Le dimanche était un jour moins dur car j'allais à la messe pour échapper aux tartines...que je retrouvais néanmoins à la sortie de la chapelle. Cela me permettait de différer un peu le gavage !
Sans le moindre doute, c'étaient des actes de maltraitance vis à vis d'enfants incapables de se défendre et qui ne pouvaient appeler personne à leur aide.
Cet épisode traumatisant de peur et d'abandon m'a marquée pour la vie, malgré une résilience certaine car il a développé un fort instinct de survie.
Et, pour le moins, il m'a dégoûtée à jamais du pain trempé!
Avec ce simple témoignage qui souhaite rester anonyme, j'ai conscience de ne pas apporter grand chose au questionnement de Liliane. C'est l'évocation de la résilience qui m'a incitée à répondre. Je la crois tout à fait réalisable, même si on a jamais fini d'en finir. Et j'ai beaucoup lu Cyrulnik.
Je serais curieuse moi aussi de connaître le motif d'inculpation de la directrice.
Merci beaucoup à l'auteur de ce blog.
Sylvie, "enfant roi" 1961.